Le Festival de Cannes ou Le Temps perdu

Santiago H. Amigorena
2.17
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Dans cet avant-dernier volume d’une entreprise romanesque autobiographique hors normes (Le Dernier livre), l’auteur entreprend de faire le rĂ©cit de 40 ans de prĂ©sence au festival de Cannes, depuis 1985. Le Festival de Cannes agit comme le « miroir grossissant » des espoirs et des dĂ©faites d’une existence. Comme une formidable anamnĂšse d’un parcours, des rĂȘves et des dĂ©sillusions, des amitiĂ©s et des amours – notamment avec des actrices cĂ©lĂšbres, quand l’auteur pĂ©nĂštre soudain, grĂące Ă  leur notoriĂ©tĂ©, au coeur de ce monde dans lequel il a pourtant le sentiment de vivre une forme d’exil. Chacun de ces voyages, dans cette atmosphĂšre festive, artistique, souvent superficielle et dĂ©lĂ©tĂšre, reprĂ©sente une sorte de petite « madeleine » condensant les mirages d’une vie, et la magie du « temps perdu ». Le cĂ©lĂšbre festival devient la chambre noire de la cruautĂ© et de la vanitĂ© sociale, mais aussi des illusions perdues. Cannes et le cinĂ©ma, c’est aussi la tentation indĂ©finiment recommencĂ©e qui dĂ©tourne le narrateur de sa vraie vocation : l’écriture. Ce qu’il dĂ©joue, d’une certaine façon, en racontant les fĂȘtes, les dĂźners, les projections, les palaces, les stars, les villas somptueuses, les invitations VIP, jusqu’aux ruses et expĂ©dients pour s’introduire dans ce monde, et les hĂŽtels miteux de la CĂŽte quand on n’a plus ou pas encore la « carte ». Mais chaque pĂ©ripĂ©tie provoque un aveu, retrouve et dissipe un regret. Toute une existence est Ă  la fois retrouvĂ©e et rĂ©inventĂ©e dans l’épuisement des mĂ©tamorphoses des codes de sociabilitĂ© et des coteries elles-mĂȘmes. Jusqu’aux fantĂŽmes du vieillissement dont la rĂ©vĂ©lation douce-amĂšre s’effectue sous les lumiĂšres factices d’une ultime fĂȘte. Roman de la fin d’un monde, dont les derniĂšres pages font irrĂ©sistiblement penser au « Bal des tĂȘtes », Ă  la fin du Temps retrouvĂ© de Proust : « Je fis quelques pas au milieu de la foule. C’était flagrant : chacun semblait s’ĂȘtre ‘‘fait une tĂȘte’’ [...] actrices, acteurs autrefois cĂ©lĂšbres, le temps avait tant travesti leurs traits qu’on avait envie de les fĂ©liciter de s’ĂȘtre si merveilleusement grimĂ©s. » Au terme d’une ultime mĂ©tamorphose, un monde s’achĂšve, pour que s’accomplisse sa recrĂ©ation poĂ©tique dans l’écriture du livre. Si Le Festival de Cannes est bien le roman de la « fin d’un monde », il est surtout celui d’une oeuvre puissante qui ne peut commencer qu’une fois accomplie l’initiation de son « auteur » et de son lecteur.
Genres:
352 Pages

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